J'ai opté pour un abrégé de cet ouvrage chapitre par chapitre parce que le sujet est d'une importance capitale pour la France, mais aussi, car je ne supporte plus la manipulation d'un grand nombre de femmes et d'hommes politiques français. À les écouter, ils résoudront les problèmes majeurs s'ils obtiennent le pouvoir. Sauf que si vous faites une rétrospective de cinquante ans, vous vous rendez compte que malgré les alternances politiques, les politiques restent identiques. Nos représentants politiques, allégeant, sont pris en étau entre des organismes supranationaux et l'euro et dorénavant une majorité du peuple qui souhaite un retour de la souveraineté.
Philippe Séguin a eu une expression tellement réaliste sur cette mascarade :
La droite et la gauche sont deux détaillants qui ont le même grossiste, l’Europe.
Il y a quelques voix dissonantes en France, mais elles sont invisibilisées dans les médias grand public. Leurs propos sont à rebours du rêve européen que les eurogagas tentent, coûte que coûte, à infuser depuis des décennies comme "l'Europe, c'est la paix", "Unie dans la diversité", "À plusieurs, nous sommes plus forts". La Suisse, l'Islande, la Norvège, Singapour, etc. sont morts de rire.
Titre : La grande dissimulation - L'histoire secrète de l'UE révélée par les Anglais.
Auteurs : Christopher Booker & Richard North.
Édition : Éditions du Toucan, 2016.
ISBN : 9782810007363
INTRODUCTION
Cet ouvrage volumineux traite de l'évolution de la construction en Europe, qualifiant ce projet politique ambitieux, malicieux et rusé. Jean Monnet et Arthur Salter, les principaux architectes de ce projet européen, imaginaient un gouvernement supranational qui coexisterait avec les États-nations tout en les gouvernant. Jean Monnet était convaincu que l'ambiguïté et la dissimulation étaient essentielles pour la réussite du projet. Il a œuvré dans l'ombre, à l'écart des projecteurs, ce qui lui a valu le surnom de "père de l'Europe". Un autre acteur important est Altiero Spinelli, un ancien communiste italien. Il partageait la vision des États-Unis d'Europe et il pensait également que la dissimulation était nécessaire. Il suggérait que la population ne soit sollicitée qu'après l'élaboration d'une constitution, une fois que la situation serait irréversible. Paul-Henri Spaak, un Premier ministre belge, a aussi joué un rôle crucial en suggérant de masquer la nature politique du projet en le présentant comme une simple coopération économique à travers un marché commun. L'auteur évoque la signature de la Constitution pour l'Europe en 2004, événement perçu comme l'aboutissement de ce projet. Il souligne les défis et les questions qui persistent, comme la possibilité de maintenir la démocratie pour un gouvernement unique sur 450 millions d'habitants ayant des langues et des cultures différentes. Il pose la question de savoir si ce pari audacieux est en passe d'être gagné ou s'il pourrait échouer.
LA NAISSANCE D’UNE IDÉE : 1918-1932
Ce chapitre retrace les origines de l'idée d'une Europe unie depuis la Première Guerre mondiale jusqu'au début des années 1930. L'auteur met en avant que la brutalité du conflit, notamment lors de la bataille de Verdun, a engendré deux leçons principales. Premièrement, la nécessité d'éviter de futurs conflits et deuxièmement, l'importance du pouvoir industriel en temps de guerre. Une volonté de reconstruction s'est manifestée après 1918. Soit par un idéalisme symbolisé par la Société des Nations (SDN) et les Quatorze Points de Woodrow Wilson, soit par un esprit de revanche, surtout de la part de la France à l'égard de l'Allemagne. Le traité de Versailles et l'occupation de la Ruhr sont présentés comme des exemples de la sévérité française.
Malgré ces tensions, des figures comme Gustav Stresemann et Aristide Briand ont travaillé à la réconciliation, signant le traité de Locarno et recevant le prix Nobel de la paix. Le mouvement des États-Unis d'Europe a pris de l'ampleur, avec des personnalités comme Richard Coudenhove-Kalergi, qui a proposé une union douanière et une fusion des industries du charbon et de l'acier franco-allemandes. Aristide Briand est devenu un ardent défenseur de ce projet, suggérant la création d'une Union fédérale européenne au sein de la Société des Nations.
Parallèlement, une approche supranationale a émergé. Louis Loucheur, inspiré par son expérience de guerre, a suggéré de placer les industries clés sous une autorité supérieure pour rendre la guerre impossible. Cette idée a été concrétisée par Émile Mayrisch avec l'entente internationale de l'acier, qui a créé la première autorité supranationale embryonnaire. Jean Monnet, fonctionnaire à la SDN a rapidement été déçu par le pouvoir de veto exercé par les États membres et leur égoïsme national. Ces comportements ont accentué sa conviction qu'une institution supranationale était indispensable pour maintenir la paix et la sécurité dans le monde. Arthur Salter, ami de Jean Monnet, a également examiné cette idée en suggérant la mise en place d'une organisation avec un secrétariat permanent ayant une autorité supérieure à celle des ministres nationaux.
Ces rêves utopiques ont cependant été balayés par le krach de 1929 et la montée du national-socialisme.
LE CUL-DE-SAC NAZI : 1933-1945
L'idée d'une Europe unie a été utilisée de manière cynique par le régime nazi à des fins de propagande durant la Seconde Guerre mondiale, bien qu'Adolf Hitler ait méprisé le mouvement d'unité européenne. Des personnalités nazies, comme l'économiste Werner Daitz et le ministre des Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop, ont promu l'idée de mettre fin à l'État-nation au profit d'une nouvelle Europe dominée par l'Allemagne. Walther Funk, le ministre des Finances, avait même avancé l'idée d'établir une Communauté économique européenne (Europäische Wirtschaftsgemeinschaft) avec une monnaie commune. Cependant, cette initiative n'a jamais abouti, car elle aurait compromis l'exploitation économique des pays sous occupation allemande.
En parallèle, l'idée de l'unité européenne a gagné du terrain en Grande-Bretagne et aux États-Unis, notamment dans les cercles pacifistes et les élites intellectuelles. En 1940, alors que la France était sur le point de s'effondrer, Jean Monnet a proposé une union franco-britannique immédiate, une idée qui a été soutenue par des personnalités influentes comme le général de Gaulle. Malgré l'approbation du Premier ministre britannique Winston Churchill, le plan a échoué en raison de l'anglophobie croissante en France et de la décision du nouveau chef d'État, Philippe Pétain, de faire la paix avec l'Allemagne.
Pendant ce temps, des mouvements de résistance à travers l'Europe ont adopté l'idée d'une Europe unie après la guerre. L'une des figures les plus importantes de ce mouvement était Altiero Spinelli, un communiste italien emprisonné qui a rompu avec son parti pour s'engager en faveur de l'unité européenne. En 1941, avec l'aide de son codétenu Ernesto Rossi, il a rédigé le "Manifeste de Ventotene", un texte fondateur du fédéralisme européen. Ce manifeste prônait la création des États-Unis d'Europe avec une constitution, une armée et un gouvernement supranational. Selon Altiero Spinelli, ce nouvel État devrait être mis en place par une dictature du parti révolutionnaire et la démocratie ne serait restaurée qu'une fois le projet presque achevé.
Le manifeste a été diffusé dans les mouvements de résistance. En 1944, une conférence majeure à Genève a réuni des militants de différents pays européens qui ont adopté une Déclaration des résistances européennes. Cette déclaration, largement rédigée par Altiero Spinelli, a jeté les bases d'une Union européenne fédérale dont les idéaux se concrétiseraient plus tard.
DEUX TENTATIVES MANQUÉES : 1945-1949
Ce chapitre présente une vision différente de la genèse de l'Union européenne. L'auteur soutient que, contrairement à l'idée reçue, la construction européenne n'a pas commencé après la Seconde Guerre mondiale. L'histoire officielle fait souvent remonter le début de cette construction au discours de Winston Churchill à Zurich en 1946. Cependant, l'auteur explique que la vision de Churchill était celle d'une alliance d'États souverains, une approche intergouvernementaliste que les futurs fondateurs de l'UE considéraient comme un obstacle. Winston Churchill a également clairement indiqué qu'une Europe unie serait une collaboration franco-allemande, sans participation directe de la Grande-Bretagne.
L'auteur décrit deux tentatives manquées d'intégration européenne entre 1945 et 1949 :
Un plan d'aide américain (plan Marshall) visait à soutenir l'économie européenne et à empêcher l'expansion du communisme, mais il comportait aussi un volet politique important. Les États-Unis encourageaient ouvertement la création d'une Europe fédérale. L'Organisation Européenne de Coopération Économique (OECE) fut créée pour gérer les fonds du plan. Cependant, l'OECE resta une structure intergouvernementale où les décisions étaient prises à l'unanimité, ce qui fut considéré comme un échec pour les partisans d'une organisation supranationale.
L'idée d'un Conseil de l'Europe fut proposée par Winston Churchill en 1946. En mai 1948, Winston Churchill présida un congrès européen à La Haye. Les délégués étaient divisés en deux camps, les fédéralistes et les confédéralistes. Les fédéralistes voulaient un gouvernement et un Parlement européen. Les confédéralistes menés par Winston Churchill préféraient une simple coopération intergouvernementale. Bien que les fédéralistes étaient majoritaires, les demandes les plus radicales furent édulcorées et l'accord aboutit à la création du Conseil de l'Europe, une institution sans pouvoir supranational. De plus, le Mouvement européen créé pour coordonner les groupes pro-européens était secrètement financé par la CIA.
L'auteur souligne que l'échec de ces deux tentatives a mis en évidence le conflit entre l'approche supranationale prônée notamment par Jean Monnet et l'approche intergouvernementale défendue par Winston Churchill et le Royaume-Uni.
UNE CONCEPTION QUASI MYSTIQUE : 1950-1951
À la fin des années 1940, Jean Monnet considérait que les tentatives d'intégration européenne comme l'Organisation Européenne de Coopération Économique (OECE) et le Conseil de l'Europe ne parviendraient pas à créer une véritable unité. Cette organisation et ce conseil manquaient de réalisations concrètes et de volonté d'attaquer la souveraineté nationale. C'est au printemps 1950 que se présenta l'opportunité de mettre en œuvre ses idées, alors que les conflits concernant l'industrie de la Ruhr, riche en charbon et acier, s'intensifièrent entre la France et la RFA. Le secrétaire d'État américain Dean Acheson posa un ultimatum à la France. Les États-Unis imposeraient leur propre solution si la France ne proposait pas de solution de compromis lors de la prochaine réunion à Londres.
Jean Monnet saisit cette opportunité pour proposer un plan qu'il avait longuement mûri, la mise en commun des industries du charbon et de l'acier franco-allemandes sous une autorité supranationale. Bien que l'objectif ultime de Jean Monnet était la création d'une fédération européenne, il a délibérément formulé son plan de manière vague, évitant de mentionner explicitement la dissolution de la souveraineté nationale. Pour faire accepter le plan, il confia sa présentation au ministre français des Affaires étrangères, Robert Schuman. Robert Schuman accepta la proposition puisqu'il incarnait la nécessité de réconcilier la France et l'Allemagne.
Le plan a été renommé "Plan Schuman". Ce plan fut annoncé le 9 mai 1950 par Robert Schuman lors d'une conférence de presse, sans que le reste du gouvernement français ni les Britanniques n'en aient été pleinement informés. L'Allemagne, sous la direction de Konrad Adenauer, accepta le plan, y voyant un moyen de reprendre le contrôle de son industrie et un pas vers l'unité européenne. Le Royaume-Uni, en revanche, s'y opposa. Le Premier ministre britannique Clement Attlee considérait le comportement français comme totalement antidiplomatique. De plus, il craignait que le plan n'implique un abandon de la souveraineté britannique à une autorité antidémocratique. L'Angleterre avec son industrie nationalisée et le Commonwealth estimait que le plan était incompatible avec sa stratégie nationale. L'exclusion de la Grande-Bretagne était d'ailleurs un objectif délibéré de Jean Monnet, qui avait anticipé leur opposition au principe supranational.
Jean Monnet fut désigné pour présider les négociations de ce plan, ce qui lui permit de diriger le processus et d'imposer son programme. Il parvint à obtenir des concessions de la part des autres pays participants (le Benelux et l'Italie) pour obtenir leur adhésion malgré les incohérences initiales du document de travail. Le "Plan Schuman" a finalement abouti à la signature du Traité de Paris le 18 avril 1951, qui créa la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier (CECA). La CECA fut perçue comme le premier gouvernement d'Europe dont Jean Monnet devint le premier président.
LA ROUTE SINUEUSE VERS ROME : 1950-1957
Ce chapitre retrace l'histoire du projet européen entre 1950 et 1957. Il souligne comment le mythe des origines, remontant à 1945, a masqué les influences antérieures des années 1920. L'auteur met en lumière le rôle central de Jean Monnet, présenté comme le véritable moteur de la Communauté européenne, alors que des personnalités comme Robert Schuman étaient plutôt ses hommes de paille.
L'auteur décrit l'échec de la Communauté Européenne de Défense (CED). L'idée d'une armée européenne avec une Haute Autorité supranationale, initiée par Jean Monnet, a rencontré une forte opposition en France. Cette opposition, menée par les socialistes et les gaullistes, a conduit au rejet du traité en 1954. Le général de Gaulle a qualifié le traité de monstrueux, car il aurait privé l'armée française de sa souveraineté. La chute de la CED constitue un revers majeur pour Jean Monnet et le mouvement supranationaliste.
Après cet échec, le projet européen a pris une nouvelle direction. Les termes "fédéral" et "supranational" ont été mis de côté au profit d'une approche plus discrète et intergouvernementale, axée sur l'intégration économique. C'est dans ce contexte que le projet Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom) est apparu, visant à intégrer l'industrie nucléaire. Jean Monnet a utilisé son allié Paul-Henri Spaak pour relancer l'idée européenne. Cependant, les négociations de Messine ont révélé la divergence des intérêts des États membres, notamment entre la France qui acceptait le projet Euratom pour ses intérêts nucléaires et l'Allemagne qui était favorable à un marché commun. La crise de Suez ainsi que le soutien des États-Unis ont joué un rôle clé dans la progression des négociations, menant à la signature du traité de Rome le 25 mars 1957. À cet instant, la Communauté Économique européenne (CEE) et l'Euratom étaient créés par l'accord des six pays fondateurs (la France, la République fédérale d'Allemagne, l'Italie, la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg). Ces traités ont jeté les bases d'un nouveau type de gouvernement avec une Commission européenne et un Conseil des ministres.
UN TRIOMPHE POUR MONNET : 1958-1961
Ce chapitre se concentre sur les débuts de la Communauté Économique Européenne (CEE) et les efforts de Jean Monnet pour faire progresser l'intégration supranationale de l'Europe, tout en s'opposant à l'approche intergouvernementale prônée par le Royaume-Uni.
Le but initial de la CEE établie par le Traité de Rome était de créer un marché commun basé sur les quatre libertés (mouvement des biens, mouvement des services, mouvement des personnes et mouvement des capitaux). Cependant, ses instigateurs la concevaient comme une forme embryonnaire de gouvernement européen, visant une intégration politique totale à long terme. Pour ce faire, ils comptaient sur la tactique de l'engrenage de Jean Monnet, qui consistait en une montée en puissance progressive de l'intégration. Les institutions de la CEE ont commencé à fonctionner à Bruxelles en 1958, avec Walter Hallstein comme premier président de la Commission. Le COmité des REprésentants PERmanents (Coreper) fut également créé, devenant rapidement une institution puissante.
Jean Monnet s'est employé à déjouer l'influence britannique, en particulier en affaiblissant l'Organisation Européenne de Coopération Économique (OECE). Par des manœuvres diplomatiques, il a encouragé les États-Unis et le Canada à rejoindre l'OECE, pour la transformer en une nouvelle Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et ainsi réduire le rôle de l'Angleterre. De même, Walter Hallstein a imaginé une stratégie pour démanteler l'Association Européenne de Libre-Échange (AELE), créée par la Grande-Bretagne et d'autres pays. Il a accéléré l'harmonisation des frais de douane au sein de la CEE, ce qui a désorganisé l'AELE et menacé sa viabilité.
Au début des années 1960, le Royaume-Uni a fait face à une crise de confiance, causée par la perte de son empire, sa faiblesse économique et l'échec de la zone de libre-échange. Le premier ministre Harold Macmillan a commencé à envisager de rejoindre la CEE pour revitaliser l'économie britannique. Des comités ont été créés pour étudier les options, avec une analyse des avantages de l'adhésion. Le gouvernement britannique était conscient des implications politiques et de la perte de souveraineté que l'adhésion entraînerait. Cependant, il y voyait une chance de partager le succès économique des six pays fondateurs.
POURQUOI DE GAULLE REFUSA L’ENTRÉE DU ROYAUME-UNI : 1961-1969
Ce chapitre explique que la principale raison derrière le double refus de Charles De Gaulle d'accepter l'entrée du Royaume-Uni dans le Marché commun n'était pas seulement la méfiance envers les États-Unis. Bien que cette raison ait été avancée, l'auteur révèle que la véritable motivation était d'ordre économique.
Le Royaume-Uni a négocié son adhésion en essayant de modifier les règles pour satisfaire ses besoins, notamment en ce qui concerne ses relations commerciales avec le Commonwealth. En 1961, 43 % des exportations britanniques étaient destinées au Commonwealth, contre seulement 16,7 % pour le Marché commun. Le Royaume-Uni a demandé des dérogations pour maintenir ces échanges, mais les partenaires européens ont refusé, voulant s'assurer de la volonté britannique d'abandonner son rôle commercial mondial traditionnel.
La France avait un secteur agricole surdimensionné, vital pour son économie et sa stabilité politique. La Politique Agricole Commune (PAC) devait servir à résoudre le problème des surplus et à garantir un financement pour les agriculteurs français.
Le système de la PAC qui était en cours de négociation devait être financé par des taxes sur les importations en provenance de pays non-membres de la CEE. L'entrée du Royaume-Uni aurait dilué ce système et il aurait mis en péril les arrangements financiers bénéfiques pour la France puisque le Royaume-Uni importait une grande partie de sa nourriture du Commonwealth. De ce fait, Charles De Gaulle a utilisé son veto pour s'assurer que les arrangements de la PAC soient finalisés avant l'adhésion du Royaume-Uni.
En résumé, les deux vetos de Charles De Gaulle étaient une manœuvre calculée pour protéger les intérêts agricoles de la France et s'assurer que la Politique Agricole Commune, importante pour la France, soit mise en place avant que le Royaume-Uni n'adhère et ne puisse la remettre en cause.
LA VÉRITABLE TROMPERIE D’EDWARD HEATH : 1970 -1972
Ce chapitre détaille les négociations secrètes et les stratégies utilisées par le gouvernement britannique de l'époque pour faire adhérer le Royaume-Uni à la Communauté Économique Européenne (CEE).
En 1970, l'opinion publique britannique était majoritairement opposée à l'adhésion à la CEE. Le sujet a été délibérément marginalisé lors de la campagne électorale qui a porté Edward Heath au poste de Premier ministre du Royaume-Uni.
Le négociateur en chef britannique a résumé la politique d'Edward Heath par la phrase “avalez-le entier et avalez-le dès maintenant”. Cela impliquait l'acceptation de 13 000 pages de nouvelles réglementations communautaires sans réelle possibilité de négociation.
L’auteur révèle l'existence des rapports Werner et Davignon qui prévoyaient une union économique et monétaire menant à un État fédéral européen et une monnaie unique. Le Foreign Office britannique avait averti en interne que cela entraînerait un abandon de souveraineté nationale, mais ces implications furent masquées au public.
Un sommet entre Edward Heath et le Président de la République française Georges Pompidou en mai 1971 fut mis en place pour donner l'impression d'une percée majeure dans les négociations. L'objectif caché de cette rencontre était en fait qu'Edward Heath assure à Georges Pompidou le soutien au projet de monnaie commune.
L’auteur mentionne un grand scandale des pêcheries. Les vastes eaux de pêche britanniques devaient devenir une ressource commune pour tous les membres de la CEE. Ce sujet a été délibérément tenu secret pendant plus de 30 ans.
Le gouvernement britannique a publié un livret de 16 pages qui présentait une version édulcorée et séduisante de l'accord pour faire accepter le traité d'adhésion. L'adoption du "European Communities Act" a ensuite permis de transférer directement les lois communautaires dans le droit britannique. Ce processus a concentré un pouvoir sans précédent entre les mains de fonctionnaires non élus.
L’ANGLETERRE RESTE À L'INTÉRIEUR : 1973 -1975
L’auteur résume les événements politiques et les débats qui ont entouré la participation du Royaume-Uni à la Communauté Économique Européenne (CEE) entre 1973 et 1975, culminant avec le référendum britannique du 5 juin 1975. La question était : "Le Royaume-Uni doit-il rester dans la CEE ?".
Le Royaume-Uni a rejoint la CEE le 1er janvier 1973. Edward Heath, Premier ministre du Royaume-Uni, a tenté de négocier un fond de développement régional pour remédier au déséquilibre du budget communautaire en faveur de l'agriculture, mais ses efforts n'ont pas abouti aux résultats souhaités. Parallèlement, Jean Monnet a proposé la création d'un gouvernement provisoire européen pour guider l'Europe vers l'intégration. Cette proposition a donné naissance au Conseil européen.
Harold Wilson, le nouveau Premier ministre du Royaume-Uni a lancé une renégociation fondamentale des termes d'adhésion après la victoire du Parti travailliste en 1974. Cette manœuvre politique vise à apaiser les divisions internes de son parti politique. Les négociations menées par James Callaghan ont porté sur la contribution budgétaire, l'accès aux produits du Commonwealth et la réforme de la politique agricole commune (PAC). Edward Heath a qualifié la renégociation d'arnaque bien que Harold Wilson ait présenté les concessions obtenues comme un succès.
Harold Wilson a décidé d'organiser un référendum pour le maintien du pays dans la CEE sur la base des termes de la renégociation. Le "oui" a été largement soutenu par les principaux partis politiques et les milieux d'affaires. La campagne a été dominée par des questions économiques, comme l'inflation galopante, plutôt que par les débats sur la souveraineté. Le 5 juin 1975, la participation fut de 64,5 % des électeurs avec 67,2 % de oui contre 32,8 % de non. L'ensemble des territoires du Royaume-Uni enregistrèrent une majorité de oui. La seule exception était les Shetland où 56,3 % de la population avait voté non ainsi que les Hébrides extérieures avec 70,3 % de non.
LE PARTENAIRE INCOMMODE : 1975 -1984
Ce chapitre présente le Royaume-Uni entre 1975 et 1984 comme un partenaire incommode de la Communauté Économique Européenne (CEE). Le Royaume-Uni était considéré comme l'homme malade de l'Europe en raison d'industries inefficaces, de grèves fréquentes et d'une main-d'œuvre abondante.
Le Royaume-Uni se préoccupait de l'augmentation de sa contribution, au point de risquer de devenir le plus grand contributeur net de la CEE. Le Royaume-Uni était en désaccord sur plusieurs politiques, notamment celles concernant l'énergie et la pêche. Il a été accusé de mauvaise foi en refusant de suivre les règles du Fonds de développement régional.
Le gouvernement travailliste dirigé par James Callaghan a freiné l'adoption d'un Parlement européen élu, risquant d’entrer en compétition avec les parlements nationaux.
Margaret Thatcher a mené une bataille pour obtenir une réduction budgétaire dès son arrivée au pouvoir en 1979. Elle affirmait qu'elle ne pouvait pas jouer les "mamans gâteau" de la CEE alors que ses propres électeurs devaient se serrer la ceinture dans de nombreux domaines.
ENTRÉE EN SCÈNE DE SPINELLI : 1979 -1986
L'auteur commence ce chapitre avec la mort de Jean Monnet le 16 mai 1979, notant que l'élan pour une "union toujours plus étroite" avait perdu de son entrain.
Le dynamisme de la construction européenne se concentrait sur la basse politique avec la Commission et la Cour européenne de justice qui œuvraient pour étendre ses pouvoirs supranationaux. La commission travaillait à l'achèvement du marché intérieur en harmonisant les lois nationales et en luttant contre les barrières non-tarifaires. Le nombre de nouvelles lois communautaires était passé à 350 par an à la fin des années 1970.
Un événement important fut l'affaire du "Cassis de Dijon" en 1979, où la Cour de justice a jugé que tout produit légalement fabriqué dans un État membre pouvait être vendu dans un autre, renforçant la doctrine de la reconnaissance mutuelle. Désormais, aucun État membre ne pouvait plus contrôler les flux de marchandises qui traversaient ses frontières au moyen de ses normes nationales.
L'introduction de la Politique commune de la pêche en 1983 est présentée comme un exemple de la nouvelle politique supranationale et fédérale. Les négociations ont été longues et complexes. Le système des quotas nationaux mis en place a révélé des défauts majeurs et des erreurs écologiques. Les pêcheurs ne pouvaient pas ramener au port certaines variétés d’espèces. La seule alternative était de renvoyer les milliards de prises dans la mer afin d'éviter d’être en illégalité alors que le poisson était mort depuis longtemps.
L’auteur met en lumière le rôle d'Altiero Spinelli qui émerge après la mort de Jean Monnet. Il fonda le "Crocodile Club" pour promouvoir une réforme des traités et une Europe fédérale en contournant les partis traditionnels.
Le plan d'Altiero Spinelli a été concurrencé par le plan Genscher & Colombo. Une alternative plus graduelle visait à renforcer la coopération politique. Bien que ce plan ait été initialement mis de côté, il a été incorporé dans la "Déclaration solennelle sur l'Union européenne" de 1983.
Margaret Thatcher a méprisé, mais au final, accepté cette déclaration. Elle qualifiait cette déclaration de "langage grandiloquent" estimant qu'elle n'avait pas de valeur juridique. Cependant, l’auteur suggère qu'elle n'a pas réalisé que le véritable objectif était d'introduire le projet de traité de Spinelli.
En 1984, le Parlement européen a adopté le projet de traité de Spinelli. Ce traité visait à créer une Union européenne avec des pouvoirs élargis pour le Parlement européen, une Banque centrale européenne et une compétence dans de nombreux domaines. Le Président de la République française, François Mitterrand a soutenu le projet de Spinelli. François Mitterrand voyait une chance de donner un nouvel élan politique à la construction européenne et aussi un nouvel élan politique national.
L’auteur évoque également la stratégie d'embuscade de Milan. La France et les Allemands ont travaillé pour faire avancer l'idée d'une conférence intergouvernementale, en dépit des objections britanniques.
L'aboutissement fut l'Acte unique européen, signé en 1986. Margaret Thatcher a accepté ce traité, pensant que l'extension du vote à la majorité ne servirait qu'à développer le marché unique. En revanche, Jacques Delors a vu ce traité comme un jalon pour de futures intégrations, notamment l'Union économique et monétaire.
LE ROYAUME-UNI SEUL DANS LA MINORITÉ : 1986 -1988
Ce chapitre se concentre sur la politique européenne de Margaret Thatcher et ses conflits avec ses propres ministres et les dirigeants de la Communauté européenne.
Le chancelier, Nigel Lawson, tchatchérien pur et dur et le ministre des Affaires étrangères, Geoffrey Howe, étaient favorables à l'adhésion au mécanisme des taux de change (Serpent monétaire européen) de la livre sterling. Geoffrey Howe considérait ce mécanisme comme un moyen politique, tandis que Nigel Lawson le voyait comme un outil économique pour rassurer les marchés. Margaret Thatcher s'y opposait fermement. Elle craignait que cela ne rende la livre sterling plus vulnérable aux spéculations. Elle décidait de mettre son veto à l'idée malgré le soutien de la majorité de ses ministres à cette idée.
Un autre conflit a éclaté entre Margaret Thatcher et son ministre de la Défense, Michael Heseltine, concernant la vente de la compagnie d'hélicoptères britannique Westland. Michael Heseltine a défendu avec passion une proposition européenne de rachat tandis que Margaret Thatcher et Nigel Lawson préféraient l'offre américaine de Sikorsky. Le désaccord public a conduit à la démission du ministre de la Défense.
Ce chapitre décrit aussi plusieurs affrontements entre Margaret Thatcher et le président de la Commission européenne, Jacques Delors. Margaret Thatcher considérait Jacques Delors comme un politicien irresponsable et un fédéraliste déterminé. Les désaccords portaient sur le budget communautaire, les dépenses de la Politique Agricole Commune (PAC) et la souveraineté nationale.
Margaret Thatcher a entrepris une guerre d'usure contre la véritable nature de la CEE après une nouvelle victoire électorale en 1987. Elle s'opposa aux propositions du "paquet Delors" qui visaient à augmenter les ressources propres et les fonds structurels de la CEE. Elle s'est retrouvée isolée lors d'un vote en 1987 sur le "Paquet Delors". Onze voix furent en faveur et une seule voix contre le paquet. M. Thatcher était seule et accusée d’avoir causé l’échec du Conseil.
En 1988, le projet de monnaie unique et de la Banque centrale européenne est devenu l'objectif principal des homologues européens de Margaret Thatcher, en particulier Jacques Delors, François Mitterrand et Helmut Kohl. Margaret Thatcher a réaffirmé son hostilité éternelle à l'idée lors du G7 de Toronto, mais a été contrainte de créer un comité pour étudier la question. Ils se mirent d’accord sur l’idée qu’un groupe d’étude serait essentiellement un comité des gouverneurs des banques centrales de la Communauté, exactement comme Margaret Thatcher l’avait suggéré. Ils nommèrent Jacques Delors comme président.
NON ! NON ! NON ! : 1988 -1990
L’auteur effectue un compte-rendu détaillé des défis auxquels a été confrontée la Première ministre britannique, Margaret Thatcher concernant l'intégration de la Grande-Bretagne dans l'Union économique et monétaire européenne.
Margaret Thatcher a vigoureusement résisté à l'idée d'une monnaie unique et d'une intégration politique plus poussée en Europe. Elle a vu le projet de l'Union économique et monétaire européenne comme une menace pour la souveraineté britannique.
Ce chapitre met en lumière les désaccords entre Margaret Thatcher et ses deux ministres, Nigel Lawson et Geoffrey Howe. Ses deux ministres étaient favorables à une plus grande coopération avec l'Europe, en particulier à l'adhésion au serpent monétaire européen.
Une union monétaire en trois étapes que proposait le rapport du Comité Delors a été un point de friction majeur. Les conditions d'indépendance de la Banque centrale européenne et la limitation des déficits budgétaires ont été acceptées par Jacques Delors pour obtenir le soutien de la Bundesbank. Nigel Lawson était opposé à l’union monétaire, synonyme d’abandon de contrôle sur des décisions économiques clés au bénéfice d’une Banque centrale européenne, mais il était favorable au serpent monétaire européen.
Pour tenter de faire accepter leurs idées à Margaret Thatcher, Nigel Lawson et Geoffrey Howe ont préparé une "embuscade". Les deux ont menacé de démissionner si elle ne s'engageait pas à rejoindre le serpent monétaire européen, la forçant à adopter une position plus pragmatique et à accepter l'adhésion. Margaret Thatcher resta intraitable sur cette question. Nigel Lawson et Geoffrey Howe prirent la décision de démissionner.
La perspective de la réunification de l'Allemagne a poussé la France et l'Allemagne à renforcer la Communauté européenne, accélérant le projet d'union politique et monétaire. Margaret Thatcher se trouvait de plus en plus isolée. À la manière d’un infidèle embrassant la foi chrétienne sous la menace d’une mort atroce, Margaret Thatcher accepta que l’Angleterre rejoigne le Serpent monétaire.
Ces étapes menaient au Traité de Maastricht. Le traité mentionne l'introduction de la clause de retrait pour le Royaume-Uni concernant la monnaie unique, le rejet du traité par le Danemark lors d'un référendum et l'effondrement du serpent monétaire européen. Le Royaume-Uni a finalement effectué un court passage dans le serpent monétaire européen.
UNE RÉVOLUTION DANS LE GOUVERNEMENT
Le chapitre commence par des exemples pour illustrer l'impact de la nouvelle législation sur les petits entrepreneurs britanniques. Un commerçant en jardinage a dû payer 20 000 livres pour faire enlever son compost, désormais considéré comme un déchet contrôlé. Un boucher s'est vu menacé de perdre sa licence s'il ne réalisait pas des modifications coûteuses pour se conformer à une directive sur la viande fraîche. Ces histoires se sont multipliées dans le pays. Elles ont montré que “l'Europe” n'était plus une entité lointaine, mais un pouvoir législatif, directement intrusif.
La nature des lois était jugée extrêmement prescriptives, intransigeantes et souvent déconnectées du bon sens. Les fonctionnaires chargés de l'application de ces lois sont décrits comme agressifs et intrusifs, contrastant avec la période moins interventionniste d'avant les années 1990. Le Parlement britannique a vu son rôle de faiseur de lois considérablement réduit. Le gros de la législation était désormais conçu par la Communauté européenne, ce qui a entraîné une révolution dans la nature du Gouvernement.
Bien que la Commission européenne employait relativement peu de fonctionnaires à Bruxelles, des milliers de fonctionnaires nationaux étaient intégrés dans la machine législative européenne. Les propositions de lois provenaient de sources variées, comme des fonctionnaires nationaux, des consultants professionnels, des universitaires ou des groupes de pression (lobby). Environ 3 000 comités opéraient à Bruxelles et le processus de négociation des lois, appelé comitologie, était jugé si complexe que seuls quelques rares élus le comprenaient. Le Conseil des ministres, censé assurer un contrôle démocratique, se contentait de valider d'un hochement de tête, la majorité des propositions, déjà approuvées en amont par les fonctionnaires du Comité des représentants permanents (COREPER). Les fonctionnaires nationaux devaient transposer en droit interne les lois communautaires. Au Royaume-Uni, cette étape a souvent donné lieu à un phénomène de plaqué or (gold-plating). Les fonctionnaires britanniques ajoutaient des exigences encore plus strictes aux directives originales communautaires. Ce zèle a parfois mené à des situations extrêmes, comme la faillite de l’entreprise Acorn Hobby-Craft qui avait dépensé 350 000 livres en frais de justice. L’entreprise avait inclus des brosses à pipes jugées dangereuses pour les yeux des enfants dans ses kits de maquettes.
L’auteur conclut que le marché unique est devenu la zone économique la plus régulée au monde malgré la zone de libre-échange promise. Les barrières protectionnistes n'ont pas disparu et de nombreuses entreprises britanniques, comme Hotbox Heaters, ont eu du mal à exporter leurs produits vers d'autres pays de l'UE à cause des différents types de gaz et du nombre de tests à effectuer afin de respecter une directive. L’auteur démontre que le nombre d'instruments statutaires (lois secondaires) a continué d'augmenter, atteignant plus de 3 000 en 1992, alors même que le Parlement examinait de moins en moins de textes. De plus, le marché unique n'a pas stimulé la croissance ni l'emploi comme espéré par les partisans de Bruxelles, avec des taux de croissance et de chômage qui se sont détériorés après 1993. Les promesses mirobolantes du projet européen se sont heurtées à une réalité bien différente.
DEHORS LE VIEUX : 1993 - 1997
L’auteur met en lumière la vision des dirigeants européens, comme le chancelier allemand Helmut Kohl, qui considérait qu'une union économique ne pourrait survivre que si elle était fondée sur une union politique. Un dirigeant français compare le projet de monnaie unique à la construction d'une cathédrale médiévale. Elle sera aussi imposante, belle et durera longtemps.
L'Europe a connu un échec économique avec une croissance en baisse et un chômage en hausse. Le système monétaire européen a subi un effondrement définitif en août 1993, la France ne parvenant pas à soutenir le franc face aux exigences de la Bundesbank allemande.
Le Premier ministre britannique John Major s'est souvent retrouvé en désaccord avec les ambitions d'intégration de ses partenaires. Il s'est opposé à la monnaie unique, au chapitre social et à l'harmonisation politique. Il a dénoncé le processus de prise de décision, qu'il considérait comme antidémocratique et dominé par un consensus franco-allemand. Il a tenté d'utiliser son droit de veto sur l'élargissement de l'UE pour conserver une minorité de blocage, mais il a fini par faire un compromis. L’auteur mentionne que l'économie britannique a recommencé à croître plus rapidement que dans les autres pays de l'UE après son retrait du système monétaire européen.
Un rapport d'un comité des Sages a suggéré de considérer l'Europe comme une marque pour la rendre plus attrayante pour les citoyens. En juillet 1994, un rapport de la Chambre des lords a signalé que la fraude, notamment dans la politique agricole commune, avait atteint une échelle monumentale.
Un accord a été trouvé pour mettre en place Europol en juin 1995. L'organisme a été présenté comme un équivalent embryonnaire pour l'UE du FBI américain. Europol est une nouvelle illustration de la méthode Jean Monnet, une nouvelle initiative importante devait d’abord être présentée comme anodine pour ne pas susciter les oppositions. Elle serait ensuite graduellement élargie…
VERS L’UNITÉ POLITIQUE : 1997 - 1999
Ce chapitre aborde l'évolution du projet européen quarante ans après le Traité de Rome. Ce projet européen a prospéré en se dotant d'une capitale, de sa propre citoyenneté, d'un drapeau et d'un hymne. L’auteur examine quatre questions principales qui se posent au projet européen à cette période :
Le transfert de pouvoir vers une entité supranationale et le contrôle de cette autorité.
L'élargissement de l'UE à des pays plus pauvres, qui exercera des contraintes sur le budget et les politiques existantes, en particulier la Politique Agricole Commune (PAC).
L'inefficacité perçue des politiques communautaires, comme la PAC et l'Union économique et monétaire.
Le déficit démocratique. Les citoyens des pays membres perçoivent celle-ci comme éloignée, bureaucratique et irresponsable.
Ce chapitre détaille également la présidence britannique de l'UE de janvier à juillet 1998. Cette présidence a été marquée par des tensions, notamment en raison de la position du Royaume-Uni sur l'euro et de son isolement dans les domaines de la politique étrangère et de la défense. L’auteur mentionne l'embarras de Tony Blair, contraint de soutenir l'euro sans pouvoir y adhérer, ainsi que les difficultés rencontrées en matière de pêche et d'agriculture.
Enfin, ce chapitre évoque l'opacité des politiciens britanniques sur l'étendue du pouvoir de l'UE et le projet de régionalisation de l'Angleterre, lié au grand projet d'une Europe des régions.
QUELLE EUROPE ? : 1999 - 2001
Ce chapitre se concentre sur les efforts d'intégration européenne, en particulier sous la présidence de Romano Prodi à la Commission européenne. Il met en évidence la forte volonté de Romano Prodi d'approfondir l'intégration et d'étendre l'Union européenne à de nouvelles nations, malgré les obstacles et les résistances internes.
Romano Prodi prend la tête de la Commission avec pour objectifs principaux de combler le déficit démocratique et d'améliorer la confiance des citoyens, notamment en renforçant les compétences de l'UE en matière de sécurité alimentaire. Il fait de l'élargissement à l'est de l’Europe, y compris l'accélération des négociations d'adhésion pour douze candidats, un thème central de sa présidence.
L'auteur décrit une tension croissante entre le projet d'intégration de Romano Prodi et les visions alternatives des dirigeants nationaux, particulièrement le Premier ministre britannique Tony Blair, le chancelier allemand Schröder et le Président de la République française Jacques Chirac. La France et l'Allemagne proposent l'idée d'une avant-garde ou d'un noyau dur d'États pour une intégration plus rapide et plus profonde, distincte des pays moins volontaires. Le Royaume-Uni se montre réticent à l'abandon de la souveraineté nationale, spécifiquement sur des sujets comme la fiscalité, la défense et les frontières. Le Royaume-Uni est perçu par ses partenaires comme un boulet. L'auteur dénonce également les campagnes de communication trompeuses du gouvernement britannique de Tony Blair sur les bénéfices de l'adhésion à l'UE.
Les discussions autour d'un traité constitutionnel et de la Charte des droits fondamentaux prennent de l'importance. La France et l'Allemagne voient cette Charte des droits fondamentaux comme une étape essentielle vers une union politique, tandis que d'autres pays s'y opposent, dont le Royaume-Uni craignant une perte de souveraineté nationale.
Le sommet de Nice vise à réformer les institutions pour l'élargissement, mais ce sommet est décrit comme chaotique et tendu, notamment en raison des conflits sur le poids des votes et la rivalité entre grands et petits États. Tony Blair obtient un certain succès sur le maintien de l'OTAN comme pierre angulaire de la défense européenne, mais le sommet est largement considéré comme un échec puisqu'il repousse de nombreuses décisions à une future conférence intergouvernementale.
En 2001, la Commission publie un document visant à réformer l'UE. L'auteur présente ce document comme une révolution secrète pour étendre le pouvoir de la Commission en s'appuyant sur la société civile et les réseaux. L'objectif caché est de contourner la résistance des gouvernements nationaux.
LE RÊVE COURONNÉ : 2002 - 2003
Ce chapitre décrit la période de la Convention sur l'avenir de l'Europe de 2002 - 2003, présidée par Valéry Giscard d'Estaing à l’âge de 76 ans. L'objectif était de rédiger une Constitution pour l'Europe. L’auteur fait un parallèle entre cette convention et la Convention de Philadelphie de 1787 qui a créé la Constitution des États-Unis, soulignant les différences fondamentales entre les deux processus.
Les institutions européennes (Commission, Parlement, Cour de justice de l'Union européenne) tendaient à renforcer l'intégration contrairement à la Constitution américaine qui a mis en place un système de contre-pouvoirs. Les Britanniques, menés par Tony Blair et Peter Hain, montrèrent souvent leur confusion et leur indécision face à ces projets.
L’auteur souligne le conflit manifeste entre les petits États, qui se sentent protégés par la Commission supranationale et les États plus puissants comme la France, qui cherchent à les dominer par le biais d’une approche intergouvernementale directoriale.
L'admission des pays d'Europe de l'Est a soulevé des craintes concernant une vague d'immigration et une crainte de charge financière sur le budget de l'UE. De leur côté, les nouveaux membres étaient frustrés de devoir adopter une législation massive sans bénéficier immédiatement de tous les avantages, comme les subventions agricoles ou la libre circulation des travailleurs.
Les profondes divisions sur l'invasion de l'Irak ont mis en évidence les désaccords entre les membres de l'UE. La France et l'Allemagne s'opposaient à cette invasion tandis que le Royaume-Uni et d'autres pays soutenaient les États-Unis d'Amérique.
Valéry Giscard d'Estaing a présenté un squelette de Constitution malgré les difficultés de négociation. Le texte final a été marqué par des compromis de dernière minute et le mot "fédéral" a été remplacé par "communautaire" pour satisfaire le Royaume-Uni. Valéry Giscard d'Estaing fit remarquer malicieusement que cela signifiait exactement la même chose.
FIN DE PARTIE : 2003 - 2004
Le chapitre détaille le projet de traité constitutionnel proposé par Valéry Giscard d'Estaing. Contrairement à la Constitution des États-Unis d'Amérique qui ne compte que 7 articles, la version européenne comptait 465 articles, dont 214 reprenaient des contenus de traités antérieurs. Ce traité visait à unifier la structure de l'Union, mettant un terme à la structure bancale des trois piliers établi à Maastricht. Tout serait désormais uni sous un chapeau commun, afin d’inclure l’ensemble des pouvoirs, des politiques et des centres d’intérêts de cette union englobante.
L’auteur présente dans ce chapitre les sept transformations fondamentales proposées par la Constitution :
- La fin de la structure à trois piliers et la fusion de la Communauté européenne et de l'Union européenne.
- L'attribution d'une personnalité légale à l'Union, lui permettant de signer des traités internationaux comme un État souverain.
- L'inscription explicite de la supériorité des lois de l'Union sur celles des États membres.
- L'établissement formel du Conseil européen en tant qu'institution de l'Union avec un président élu pour cinq ans par les chefs de gouvernement, créant ainsi deux “super-présidents”, le président de la Commission européenne et le président du Conseil européen.
- L'extension significative des pouvoirs de l'Union à de nouveaux domaines, tels que la politique de défense, l'énergie et l'économie.
- La réduction du nombre de vetos nationaux et l'extension du vote à la majorité qualifiée.
- Le nouveau statut de la Charte des droits fondamentaux, qui passerait d'une simple déclaration de principes à un instrument majeur applicable par la Cour européenne de justice.
L’auteur met en lumière les tensions et les objections soulevées par plusieurs pays et personnalités. La Constitution est vue comme une nouvelle étape vers l'intégration permanente plutôt qu'un aboutissement. Le président tchèque Václav Klaus critiquait le texte comme étant la première pierre d'un super-État européen. L'Espagne et la Pologne s'opposaient à la proposition de double majorité qui réduisait leur pouvoir de vote. Le Royaume-Uni, sous la direction de Tony Blair, défendait ses lignes rouges concernant la fiscalité, la Sécurité sociale et la politique étrangère.
La Conférence intergouvernementale, lancée à Rome en octobre 2003, visait à finaliser le traité. Les négociations furent marquées par des désaccords persistants, notamment entre la France, l'Allemagne, la Pologne et l'Espagne. Le Pacte de stabilité et de croissance était un autre point de discorde, la France et l'Allemagne ayant obtenu un assouplissement de ses règles.
En dépit des efforts, la Conférence intergouvernementale de décembre 2003 à Bruxelles fut un échec. Le Premier ministre italien, Silvio Berlusconi, a ajourné la réunion, marquant la première fois dans l'histoire qu'une telle conférence n'arrivait pas à se conclure à la date prévue. La patate chaude de la Constitution fut transmise à la présidence irlandaise en 2004.
CHOC DE LA RÉALITÉ : 2004 - 2005
Ce chapitre décrit les événements entourant le Traité établissant une Constitution pour l'Europe (TCE) entre 2004 et 2005.. Le TCE est un texte de 844 pages et il a été signé par les dirigeants de l'Union européenne en juin 2004, mais la version complète n'a été disponible qu'en novembre 2024. Il visait à étendre les pouvoirs supranationaux de l'UE et à augmenter le rôle du Parlement européen. Le TCE comprenait 448 articles, 36 protocoles et 30 déclarations. Il accordait à l'UE de nouvelles compétences, notamment une politique spatiale et le pouvoir de coordonner la politique sportive. Le droit de veto des États membres a été abandonné dans 61 domaines.
Malgré cela, le TCE était perçu comme hermétique et ses formulations tortueuses reflétaient des pressions contradictoires. L’auteur note que la Constitution n'a pas rendu de pouvoirs aux parlements nationaux. De plus, le TCE ne contenait aucune sanction pour les États membres en infraction avec le Pacte de stabilité et de croissance.
Le processus de ratification du TCE a été chaotique. L'Espagne, le Benelux et le Portugal ont prévu des référendums, tandis que d'autres pays comme l'Allemagne ont opté pour la voie parlementaire. La Hongrie a été le deuxième pays à ratifier le traité par un vote parlementaire.
La nomination de Rocco Buttiglione comme commissaire à la justice a créé un scandale en raison de ses déclarations sur l'homosexualité. En conséquence, le président de la Commission, José Manuel Durão Barroso a dû retirer sa proposition et former une nouvelle équipe.
L'Allemagne a enfreint le Pacte de stabilité pour la troisième année consécutive. La Commission a découvert que l'Italie avait triché sur ses déficits budgétaires depuis 1997 et la Grèce dépassait également la limite des 3 % de déficit.
La France a organisé un référendum en mai 2005 et les Français ont rejeté la Constitution avec 55 % des voix. Ce "non" français a été suivi par un "non" néerlandais. En réponse, l'UE a décidé de mettre le processus de ratification sous le boisseau et d'entamer une période de réflexion.
" Si c’est oui, nous dirons “On y va” et si c’est non, nous dirons, on continue. "
Jean-Claude JUNCKER, 25 mai 2005.
" L’intégration européenne est heureusement un train roulant trop vite pour que quiconque puisse prétendre l’arrêter ".
Václav HAVEL, Prague Daily Monitor, 8 juillet 2005.
MA RAPIDE CONCLUSION
Cet ouvrage est une critique du rôle des élites européennes et britanniques. Les auteurs soutiennent que le peuple britannique et les autres peuples européens ont été maintenus dans l’ignorance du projet réel, créer un super-État européen non démocratique. Le référendum britannique du 23 juin 2016 a abouti au Brexit et il est perçu comme un réveil populaire tardif face aux agissements sournois de leurs dirigeants politiques dans les négociations pour la construction de l'Union européenne.
Vous connaissez la suite après le référendum de 2005 pour la France. Nicolas Sarkozy, déni de démocratie, Traité de Lisbonne et traîtrise…
La lecture de ce livre révèle clairement que de nombreux responsables politiques français ont recours au mensonge, ou plutôt à une certaine flexibilité avec la vérité, lorsqu'ils promettent de s'attaquer à différentes problématiques dès qu'ils auront accédé au pouvoir. Une grande partie de notre souveraineté s'est déplacée vers des organismes supranationaux. Pensez-y lors des prochaines élections…